Épisode 02 : Les xylothermes chapitre 02

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Chapitre 2

Aussitôt dit, aussitôt fait, à peine le temps d’empaqueter leurs affaires qu’ils étaient déjà sortis. Le vieux Évrard les avait d’abord conduits au marché ; il comptait s’y approvisionner avant de partir.

« On ne loue pas de carriole ?

– J’ai déjà la mienne ! D’ailleurs… » répondit Évrard.

Il fit un signe de tête pour désigner Silyen et Louwet.

« Tu emmènes ces deux-là ? C’est dangereux.

– Je peux me défendre toute seule. Je suis même plus forte que toute la rue réunie ! » protesta Silyen en agitant ses quatre tentacules menaçants.

« Et Louwet… je suis censé la garder, je ne peux pas la laisser à Bréhant. Et puis, elle voulait vraiment venir avec nous.

– Quel irresponsable tu fais !

– Je l’ai déjà sauvé d’un nid de gobelin, alors ce n’est pas un voyage en plein jour qui me mettra en difficulté ! N’est-ce pas, Louwet ? »

La fillette ne répondit pas, trop occupée à regarder les stands du marché. Savara était à la fois une ville frontière entre les terres du royaume et la Marche des Keltes, et un point de passage crucial sur le cours du fleuve Kerdu ; ainsi, on y trouvait toutes sortes de marchandises.

Un artisan proposait des statuettes en terre cuite peinte représentant les personnalités importantes de la marche : le prince Childebert, sa femme, la duchesse Éporée, mais aussi la générale en cheffe, Téïas Bayaxa, ou encore Teutomer, le consul royal.

Walcaud se saisit de la statuette de la générale. Elle était très bien faite, et représentait son modèle en pleine action dans un combat.

« Ce n’est pas très fidèle ! s’exclama-t-il en remarquant qu’elle était sculptée plus callipyge qu’elle ne l’était en réalité.

– Tu parles comme si tu l’avais déjà rencontré en personne, dit Évrard.

– Eh, tu me prends pour qui ? Je suis un soldat d’élite, bien sûr que je l’ai déjà rencontré ! »

Il se frotta les bras et eut un frisson.

« Même si je voudrais bien l’oublier ! »

Il reposa la statuette.

« Ce genre de jouet, c’est pour les grands. Les petites filles aiment plutôt ça ! » dit Évrard en indiquant un stand où s’amassaient des peluches rembourrées de plumes ou de coton. Elles étaient à l’effigie des dieux.

Louwet avait les yeux rivés sur une grosse peluche représentant Puphlune, le dieu de la fête et du vin, patron bedonnant des hommes-chats et divinité principale du culte mérovien.

Walcaud se pencha pour voir le prix.

« Un solidus ? Un solidus ! Ça fait mille pièces de bronze !  s’étrangla-t-il.

– Je l’ai dit ! Le commerce est perturbé à cause des monstres. », expliqua Évrard.

Poussant un soupir, Walcaud posa la main sur la tête de Louwet. Avec ses économies actuelles, il ne pouvait pas se permettre une telle dépense. Il se demandait d’ailleurs si cette soudaine augmentation de monstre avait à voir avec le nid de gobelin qu’il avait trouvé…

« Il va falloir que j’enquête rapidement… murmura-t-il.

– Enquêter ? Pas la peine. Tu en trouveras à Arbone, des peluches ! » répondit Évrard qui n’avait pas changé de sujet de conversation.

« Pourquoi tu veux aller à Arbone, d’ailleurs ? C’est pas une grande ville. Si tu veux commercer, tant qu’à faire, autant aller à Matroxoda ou même à Sanios…

– Ma fille y habite ! Je devais lui rendre visite, mais avec tous ces foutus monstres, ça faisait trois jours que je retardais mon voyage ! 

– Je vois… ta fille te manque.

– Pas du tout ! J’avais… juste des choses à lui dire ! » déclara Évrard, et pour terminer la conversation, il se pencha sur un stand en fronçant ses gros sourcils gris.

Walcaud croisa les bras et poussa un soupir. Même le vieux Évrard avait le sens de la famille !

« Je crois qu’on a tout, conclut le marchand en fourrant de la viande séchée dans son sac.

– C’est tout ? Arbone est à trois jours de voyage, on va avoir besoin de plus de provisions…

– Trois jours ! »

Évrard le regarda avec un petit sourire en coin.

La carriole était garée à l’entrée de la ville. Walcaud se crut de devoir présenter aux gardes le laissez-passer donné par la duchesse. C’était l’occasion d’impressionner un peu Louwet et aussi Silyen ; mais le marchand, sans l’attendre, leur avait déjà ouvert les portes avec ses propres documents.

« C’est la première fois que je monte dans une carriole ! » s’exclama Louwet, assise à l’arrière, en balançant ses petites jambes dans le vide.

« Tu sais conduire ? demanda Walcaud à Évrard.

– Bien sûr que je sais ! »

Il fit claquer sa bride si sec qu’ils partirent en trombe sur le chemin de terre.

« Allez, hue ! »

Le mercenaire avait failli tomber à la renverse. Il n’avait jamais vu des chevaux partir au quart de tour et aussi vite !

« Ça va pas la tête ?!

– On arrivera plus vite comme ça !

– On va surtout se prendre un passant ! Ah, là devant, un mouton ! »

Évrard donna un coup de bride, et la carriole s’engagea dans une manœuvre serrée, projetant ses occupants contre la rambarde.

« Louwet, ça va ? » s’inquiéta Walcaud. Si elle se blessait, il avait peur que la duchesse lui passe un sacré savon !

Mais la petite, bien accrochée, était aux anges et riait à chaque cahot.

« C’est trop drôle ! Ça va toujours aussi vite, une carriole ?

– Certainement pas ! Et toi Silyen ? »

La sirène, penchée à l’arrière, était en train de vomir son petit déjeuner.

« Bon, laissons-la tranquille… »

Walcaud, qui s’était calmé, remarqua que les chevaux ne faiblissaient pas.

« Ils sont bien endurants. C’est une race spéciale ?

– Non, mais je leur ai fait boire un fortifiant acheté dans le quartier elfe.

– Un fortifiant ! Ça a dû te couter cher.

– Je préfère traverser les forêts au plus vite. Avec tous ces monstres et sans protection…

– Eh, je suis là !

– Oui, oui… »

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